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Le rôle immunomodulateur des cellules endothéliales

Les vaisseaux sanguins ne sont pas seulement des tuyaux perfectionnés permettant l’apport des éléments nécessaires aux organes et l’évacuation des déchets. Depuis de nombreuses années leur rôle en immunologie est étudié.
un article rédigé par Chloe BOST 08/02/2023
  • Public cible : étudiants
  • Temps de lecture : 5 minutes
  • Un article relu par les Pr Marcelo DE CARVALHO BITTENCOURT (Nancy) & Sylvain DUBUCQUOI (Lille)

Les vaisseaux sanguins ne sont pas seulement des tuyaux perfectionnés permettant l’apport des éléments nécessaires aux organes et l’évacuation des déchets. Depuis de nombreuses années leur rôle en immunologie est étudié. Tout d’abord car leur architecture permet de limiter l’infiltration des molécules et cellules dans les organes. Mais aussi parce que les cellules endothéliales, en première ligne au contact des cellules et molécules du sang, partagent dans l’évolution un ancêtre commun avec les cellules immunes présentes chez les invertébrés (Schmidt T and Carmeliet P, Nature, 2010). Dans le foie, les cellules endothéliales des sinusoïdes hépatiques peuvent être générées à partir de précurseurs myéloïdes (c'est à dire issus de la moelle osseuse) en cas de dommage hépatique conduisant à une régénération tissulaire (Andueza A et al. Cell Rep 2020). Des études transcriptomiques (conduites dans des modèles murins mais aussi chez l’homme) ont mis en évidence au niveau de l’aorte lors d’une anomalie de flux sanguin, la présence d’un sous-groupe de cellules endothéliales exprimant alors des marqueurs de cellules immunes.

Quelles sont leurs fonctions ?

Le rôle des cellules endothéliales en partenariat avec le système immunitaire avait déjà été évoqué il y a plus de 100 ans lorsque des cellules endothéliales sinusoïdales du foie, de la rate et d’autres organes avaient montré des propriétés « d’éboueur » complémentaires à celles des macrophages. Elles expriment des molécules d’adhésion jouant un rôle important dans le recrutement tissulaire des cellules immunitaires circulantes. En plus de cela, on sait aujourd'hui que les cellules endothéliales expriment des molécules de co stimulation et de co inhibition, habituellement exprimées par les cellules immunitaires et permettant des interactions avec celles-ci (Carman CV and Martinelli RT, Front Immunol 2015). Elles ont aussi la capacité d’induire l’apoptose d’autres cellules (Motz G et al. Nat Med 2014) et peuvent, au moins dans certaines conditions, exprimer des molécules HLA de classe II, les rendant alors capables de présenter des antigènes aux lymphocytes T CD4 (Wedgood JF Hatam L and Bonagura VR, Cell Immunol 1988). Elles sont enfin capables de sécréter des chimiokines et cytokines et possèdent des récepteurs à certaines cytokines. Elles semblent donc posséder un rôle immunomodulateur important.

Les cellules endothéliales sont donc utiles à l’homéostasie immunitaire dans les organes, permettent le recrutement et l’infiltration de cellules immunes spécifiques lors d’infections et participent à la communication avec les cellules immunes résidentes. Ces cellules peuvent ainsi avoir des fonctions importantes dans les maladies infectieuses, auto-immunes, dans les cancers ou encore être impliquées dans les processus de neuro-dégénération.

Quelles sont les nouveautés ?

Des études plus récentes, mettant à profit les nouvelles techniques de "single cell", ont permis de révéler que les cellules endothéliales sont différentes selon les organes, selon les tissus, voire selon la localisation dans le lit vasculaire. Elles possèdent alors une signature transcriptomique spécifique. Plusieurs d’entre elles ont des caractéristiques les classant dans le groupe des cellules endothéliales immuno-modulatrices. De nombreuses questions sont dorénavant à explorer : quel est le rôle de ces cellules au sein des tumeurs ? peuvent-elles être considérées comme de véritables cellules présentatrices d’antigène et sont-elles capables de promouvoir une tolérance ou une inflammation ? Sachant que dans ce cas, leur abondance est bien plus importante que les cellules présentatrices d’antigène professionnelles. Et bien sûr quelles sont les conséquences des interactions de ces cellules avec les cellules immunes, possiblement spécifiques des organes ou tissus.

Les cellules endothéliales peuvent donc être considérées comme des acteurs à part entière du système immunitaire mais dont les fonctions physiologiques et pathologiques restent à affiner.

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